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Relancer le débat sur la déperdition scolaire des filles dans le Pakao est crucial, et l’allocution de Mme Sadio Barro Sagna lors des activités socioculturelles du CEM de Kolibantang le 28 juin 2025 a servi de catalyseur. En abordant la thématique de la scolarisation, de la déperdition et du maintien des filles, Mme Sagna a mis en lumière les défis auxquels les jeunes filles rurales sont confrontées, notamment la pauvreté, les mariages précoces, les tâches domestiques, le manque d’infrastructures scolaires et l’éloignement géographique.
Causes de la déperdition scolaire : Un débat aux multiples facettes
Kéranos Média a relancé le débat dans son panel RFK Inter.
Si le constat de la déperdition scolaire est largement partagé, les responsabilités divergent.
Monsieur Biaye, enseignant et directeur de l’école de Madina Demba Sow, pointe du doigt le manque de suivi parental. Il observe que de nombreux parents du Pakao ne connaissent même pas les enseignants de leurs enfants et ne s’assurent pas de leur assiduité scolaire. Pour lui, un engagement plus régulier des parents avec l’établissement scolaire est indispensable.
De son côté, le chef du village de Katabina, Ahmadou Bouyé Ndiaye, met en garde contre les craintes culturelles et les préjugés. Il a partagé une anecdote qui offre une perspective éclairante sur les appréhensions culturelles entourant l’éducation des filles. En 1994, alors qu’il était à Badibou Salikégné en Gambie, la fille de l’imam ratib Ibrahima Cissé recevait la visite de sa correspondante, une jeune fille européenne de 16 ans, accompagnée de ses parents. Au cours d’une discussion sur les obstacles à la scolarisation des filles, le père de la fille a exprimé une peur répandue : celle qu’une fois instruites, les filles changent de comportement et de mode de vie, s’éloignant de leurs racines culturelles.
C’est la jeune fille de 16 ans qui, avec une sagesse surprenante, a répondu au savant : « Mais le savoir ne fait jamais changer une personne en la pervertissant ; c’est plutôt l’éducation qu’elle reçoit et son cadre de vie qui peut la faire dévier. » Cette réplique puissante souligne une vérité fondamentale : l’instruction n’est pas une menace pour les valeurs culturelles, mais un outil d’émancipation.
M. Ndiaye a ensuite lancé un appel solennel à la population, les exhortant à soutenir et encourager leurs filles à étudier. Il a déploré la tendance à instrumentaliser les femmes dans les cérémonies politiques, les réduisant à des rôles de chanteuses et de danseuses. Pour lui, il est temps de dépasser ces clichés : « Si une femme est instruite, elle pourrait bien mieux suivre l’éducation de ses enfants. » Son message est clair : l’éducation des filles est un investissement pour l’avenir de toute la communauté.
Kéba Faty, enseignant d’arabe à Casa Sinkére avec près de 30 ans d’expérience, déplore également la déperdition scolaire des filles, y compris dans les écoles coraniques. Il constate que, malgré leurs performances scolaires souvent supérieures à celles des garçons, et ce, malgré leurs lourdes tâches ménagères, les filles ne terminent fréquemment pas leur scolarité.
Tâches domestiques et mariages précoces : Des facteurs aggravants
Mme Aissatou Seydi, du village de Pakao Macka, justifie la nécessité des tâches domestiques pour inculquer aux jeunes filles les valeurs de travail et les préparer à la gestion de leur foyer. Cependant, elle attribue la responsabilité principale de la déperdition scolaire aux pères de famille. Selon elle, dans le Pakao, les pères sont les piliers de la famille et leur soutien est déterminant pour la scolarisation des filles. Elle cite l’exemple de Sadio Barro Sagna, issue d’une grande famille maraboutique, comme preuve qu’une femme peut réussir ses études indépendamment de son milieu d’origine. Mme Seydi insiste sur le fait que les mariages précoces sont souvent le fait des pères, et non des mères.
Fodé Faty, de Sobaly, aborde le problème des mariages précoces, les attribuant à la peur des parents de voir leurs filles tomber enceintes et ainsi déshonorer la famille. Il a cité des cas de grossesses en cours d’année scolaire ayant découragé les parents. Malgré cela, il reconnaît le potentiel supérieur des filles, prenant l’exemple de ses propres filles qui surpassent ses garçons à l’école. Il encourage vivement les parents à soutenir la scolarité de leurs filles.
Le débat lancé par Mme Sadio Barro Sagna met en lumière la complexité de la déperdition scolaire des filles dans le Pakao, impliquant des facteurs économiques, sociaux, culturels et éducatifs. Il est clair qu’une approche collaborative, impliquant parents, enseignants et chefs de communauté, est essentielle pour garantir un avenir éducatif prometteur pour toutes les jeunes filles de la région.
Arfang Lang Konté
Bravo à toi Arfang. Tu fais un bon travail avec ton équipe. Bon courage