
La scène politique guinéenne est secouée par une annonce qui défie l’entendement et l’État de droit, à l’approche de l’élection présidentielle fixée au 28 décembre 2025. Aboubacar Sidiki Diakité, alias Toumba, l’ancien aide de camp du capitaine Moussa Dadis Camara et figure centrale du procès du massacre du 28 septembre 2009, a officiellement déposé sa candidature pour ce scrutin crucial. Depuis sa cellule à la maison centrale de Conakry, où il purge une peine de dix ans de prison pour crimes contre l’humanité suite à sa condamnation en juillet 2024, Toumba Diakité a franchi les étapes préliminaires en versant la caution de 900 millions de francs guinéens, se présentant sous la bannière du Parti pour la Réconciliation et du Travail (PRT).
Cette démarche inédite soulève immédiatement un vif débat sur la légitimité et la compatibilité entre une lourde peine d’emprisonnement et la participation à la plus haute élection du pays. Condamné pour des crimes aussi graves que ceux commis au stade de Conakry en 2009, Toumba Diakité se heurte de plein fouet aux principes fondamentaux du droit électoral, qui exige que tout candidat à la magistrature suprême « jouisse de ses droits civils et politiques ». Une condamnation pour crime entraînant très souvent la privation automatique de ces droits, la Cour Constitutionnelle est désormais l’arbitre principal. Elle devra examiner la recevabilité de ce dossier, une décision qui s’annonce comme un test décisif pour l’État de droit et la lutte contre l’impunité en Guinée.
La candidature de Toumba Diakité vient s’ajouter à une compétition électorale déjà sous haute tension. La course est dominée par l’annonce tardive mais significative du chef de la junte, le Général Mamadi Doumbouya. Après avoir initialement promis qu’il ne se présenterait pas, sa candidature officielle, rendue possible après l’adoption d’une nouvelle Constitution, est perçue comme un coup de force politique visant à se maintenir au pouvoir au-delà de la transition.
Face à ces figures controversées, d’autres personnalités politiques majeures ont déposé leur dossier, malgré la difficulté à réunir les parrainages et la caution exigée. Parmi elles, on retrouve des figures expérimentées comme l’économiste Ousmane Kaba et l’ancien Premier Ministre Lansana Kouyaté, ainsi que des acteurs de l’opposition comme Makalé Camara, ancienne Ministre des Affaires étrangères, Faya Millimono du Bloc Libéral, et Ansoumane Fofana du Rassemblement des Guinéens pour l’Alternance.
La Cour Constitutionnelle a désormais la lourde tâche d’analyser tous ces dossiers et, d’ici la mi-novembre, de publier la liste officielle des candidats. L’élection du 28 décembre 2025 s’annonce déjà comme l’une des plus controversées de l’histoire guinéenne, car le sort des candidatures, notamment celle de Toumba Diakité et du Général Doumbouya, pèsera lourdement sur la crédibilité du processus.

