L’ombre éternelle du Joola : 23 ans de deuil, de mémoire et d’exigence de vérité

Aujourd’hui, 26 septembre, marque le triste 23ème anniversaire du naufrage du M/S « Le Joola », une tragédie qui a…
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Aujourd’hui, 26 septembre, marque le triste 23ème anniversaire du naufrage du M/S « Le Joola », une tragédie qui a englouti des milliers de vies et laissé une blessure béante dans l’histoire du Sénégal.


Le Drame du 26 Septembre 2002 : Faits et Chiffres

Dans la nuit du 26 au 27 septembre 2002, vers 23 heures, le ferry sénégalais, propriété de l’État et géré par la Marine nationale, chavira en quelques minutes au large des côtes gambiennes.

Le « Joola » était conçu pour transporter un maximum de 580 personnes (536 passagers et 44 membres d’équipage). Cependant, lors de sa dernière rotation, il embarquait une surcharge massive, avec près de 2 000 passagers à bord selon certaines expertises, ou environ 1 220 passagers selon les estimations de la commission d’enquête technique.

Les bilans officiels font état d’au moins 1 863 victimes décédées ou portées disparues parmi les passagers et l’équipage. Seuls 64 ou 65 rescapés ont pu être secourus. Parmi les victimes recensées, 30 % étaient des mineurs, et 76 % avaient moins de 35 ans.

Une Catastrophe Annoncée : Les Causes de l’Aberration

La commission d’enquête technique a conclu que le chavirement était dû à l’effet conjugué d’une surcharge extrême de passagers dans les superstructures et d’un défaut de ballastage (pour stabiliser le navire), aggravé par les conditions météorologiques rencontrées (un « grain tropical »).

Ce désastre est le résultat de manquements graves et répétés de la part des autorités et de l’équipage :

  • Le navire avait appareillé sans attendre la visite technique requise.
  • Il ne disposait plus de permis de navigation valide depuis juin 1999.
  • Le commandant n’aurait pas procédé aux calculs de stabilité avant le départ, ce qui constitue une faute extrêmement grave.
  • Les équipements de sécurité vitaux, tels que les balises de détresse (EPIRB), étaient probablement défectueux ou manquants.
  • Les radeaux de sauvetage n’ont pas pu se larguer automatiquement, car le système hydrostatique était défectueux et les radeaux étaient sanglés au navire.
  • Les opérations de sauvetage officielles ont été tardives et mal coordonnées, l’alerte réelle par la Marine nationale n’ayant été confirmée que tard dans la matinée du 27 septembre.

Plaidoyer pour la Justice et la Mémoire

Au Sénégal, l’enquête a été classée sans suite en 2003, la responsabilité ayant été attribuée au seul capitaine du navire, présumé décédé. En France, où des familles ont porté plainte, la justice a opposé l’immunité de juridiction aux dirigeants sénégalais mis en cause, arguant que la gestion du Joola relevait d’un acte de puissance publique et non d’un acte de gestion privée.

Aujourd’hui, l’exigence de vérité et de justice demeure vive. Les familles réclament toujours le renflouement de l’épave, échouée à environ 25 mètres de profondeur, afin d’honorer la mémoire des disparus dont les corps y sont prisonniers.

Hommage aux Naufragés

Ce deuil éternel honore la mémoire de ces 1 863 cœurs arrachés, unis indistinctement dans une mort si subite, qu’ils soient élèves, étudiants, commerçants, militaires, ou artistes. Nous nous souvenons de Martha et Thomas Abeudje, dont les noms ouvrent la longue liste, et d’Illiassou Zoubeirou, auditeur de Justice et dernier nom enregistré.

Pour toutes les victimes et pour les victimes survivantes (les rescapés), nous proclamons que leur souvenir doit continuer à exiger la justice et empêcher l’oubli. L’édification d’un mémorial national, promise dès les premières semaines après le drame, reste un devoir impératif pour dire : Plus jamais ça !.

KERANOS MEDIA